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Aurélie William Levaux 
2021C023

Cette chambre à moi, cet espace, ce temps, pour créer, de toute façon, même si j’en aurais eu besoin, m’aurait été plus ou moins inatteignable. J’entendais souvent des artistes, des connaissances, des amis, jusqu’au père de la petite, évoquer ce besoin de temps et d’espace pour s’appliquer à faire de l’art. J’ai un projet à terminer, peux-tu garder mon fils ? me demandait-on. C’est ma semaine d’accrochage, je ne serai pas disponible, s’excusait-on. Je pars pour un mois de résidence littéraire, je ne serai pas très joignable, m’annonçait-on. Je suis un auteur, tu comprends, j’ai besoin de silence, m’expliquait-on. Moi, je ne pouvais et ne voulais rien mettre de côté. Déjà, je n’étais pas assez bien née pour me permettre de me consacrer uniquement à ce que certains percevaient plus comme une passion, voire un hobby, qu’une mission, je devais donc travailler en parallèle. Et puis, il était hors de question que je néglige mon rôle de mère, hors de question que je néglige mon rôle de femme-amante-compagne, hors de question aussi que je ne me lance pas dans des projets neufs et des aventures sociales. Et puisque, par manque de choix et par envie d’être présente à tous, j’avais développé une capacité à tout cumuler et relier, bizarrement, pour beaucoup de monde, ça revenait au fait que je ne fichais pas grand-chose ou en tout cas, que tout m’était tellement fluide et vite expédié, qu’on pouvait m’en remettre sur le dos ou en tout cas estimer que, non, c’était clair, je n’avais besoin de rien, ni d’espace, ni de temps, et certainement pas d’une chambre à moi.

***

J’écrivais ça dans ma tête, sous la tente, au milieu de la petite maison sans électricité où nous nous étions réfugiés après les inondations. J’avais cherché mon carnet à tâtons. Tu as une lampe de poche ? j’avais demandé à Baptiste. Non, il n’en avait pas. J’écrirai demain, j’avais pensé avant de m’endormir. Demain, tout ira bien.

 

FIN

Cette chambre à moi, cet espace, ce temps, pour créer, de toute façon, même si j’en aurais eu besoin, m’aurait été plus ou moins inatteignable. J’entendais souvent des artistes, des connaissances, des amis, jusqu’au père de la petite, évoquer ce besoin de temps et d’espace pour s’appliquer à faire de l’art. J’ai un projet à terminer, peux-tu garder mon fils ? me demandait-on. C’est ma semaine d’accrochage, je ne serai pas disponible, s’excusait-on. Je pars pour un mois de résidence littéraire, je ne serai pas très joignable, m’annonçait-on. Je suis un auteur, tu comprends, j’ai besoin de silence, m’expliquait-on. Moi, je ne pouvais et ne voulais rien mettre de côté. Déjà, je n’étais pas assez bien née pour me permettre de me consacrer uniquement à ce que certains percevaient plus comme une passion, voire un hobby, qu’une mission, je devais donc travailler en parallèle. Et puis, il était hors de question que je néglige mon rôle de mère, hors de question que je néglige mon rôle de femme-amante-compagne, hors de question aussi que je ne me lance pas dans des projets neufs et des aventures sociales. Et puisque, par manque de choix et par envie d’être présente à tous, j’avais développé une capacité à tout cumuler et relier, bizarrement, pour beaucoup de monde, ça revenait au fait que je ne fichais pas grand-chose ou en tout cas, que tout m’était tellement fluide et vite expédié, qu’on pouvait m’en remettre sur le dos ou en tout cas estimer que, non, c’était clair, je n’avais besoin de rien, ni d’espace, ni de temps, et certainement pas d’une chambre à moi.

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J’écrivais ça dans ma tête, sous la tente, au milieu de la petite maison sans électricité où nous nous étions réfugiés après les inondations. J’avais cherché mon carnet à tâtons. Tu as une lampe de poche ? j’avais demandé à Baptiste. Non, il n’en avait pas. J’écrirai demain, j’avais pensé avant de m’endormir. Demain, tout ira bien.

 

FIN