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Note : C’est étrange qu’un territoire change si drastiquement de température au long d’une si courte promenade. Je sens que ce lieu a des secrets ou des enchantements et pourtant je n’ai pas peur.

 

Je trouve déjà pénible de retourner dans ma cellule. Mais je comprends qu’il faut que je me confine. Je me demande combien de temps encore il faudra, avant que les économistes au pouvoir se rendent compte qu’il est temps de changer d’ère. Les pandémies seront répétitives autrement, infinies.

J’éventre mon sac sur le lit et place mes vêtements en pile sur la commode, mes calepins crayons et ordinateur sur la table ronde de la cuisinette, et mes livres sur la table de chevet. Je me rends à la salle de bain où je dépose ma trousse de toilette. Je n’y mets presque plus rien. Si je me rappelle mes premiers voyages dans la vingtaine, j’y collectionnais les accessoires. Entre autres, cette affreuse machine épilatoire électrique, qui avait failli mettre le feu à mon appartement parisien, à cause de son adaptateur déficient. Je pense que c’est un des moments qui m’ont poussée à arrêter l’épilation. S’il en va de ma sécurité, je préfère mes poils. J’y traînais aussi mon maquillage, un parfum, des bijoux, choses que je ne porte presque plus aujourd’hui. J’ai tout de même apporté un mascara et un bâton de rouge à lèvres. Je sais que j’en aurai besoin pour me tracer un visage, pendant ces deux semaines à me mirer seule devant les glaces de la chambre et de la salle de bain. Je me regarde beaucoup pour faire passer le temps. J’ai développé ce réflexe depuis l’enfance, je ne sais pas si c’est un acte narcissique ou si c’est simplement une façon de me voir comme qui me voit, de me représenter mon image. Peut-être que c’est un réflexe animalier, comme une chatte qui ne comprend pas qu’elle est face à elle-même, se braque, croit peut-être se reconnaître puis se dédouble à nouveau. Dans mon appartement, à trois semaines de bateau, j’habite seule avec cette glace qui sert de porte à la douche. Alors parfois je suis avec une autre. Le confinement pandémique n’a pas beaucoup changé mon rapport à mon intimité. Je suis souvent seule. J’ai le loisir de l’éloignement quotidien.

 

Aller au lit
Rejoindre les océans

Note : C’est étrange qu’un territoire change si drastiquement de température au long d’une si courte promenade. Je sens que ce lieu a des secrets ou des enchantements et pourtant je n’ai pas peur.

 

Je trouve déjà pénible de retourner dans ma cellule. Mais je comprends qu’il faut que je me confine. Je me demande combien de temps encore il faudra, avant que les économistes au pouvoir se rendent compte qu’il est temps de changer d’ère. Les pandémies seront répétitives autrement, infinies.

J’éventre mon sac sur le lit et place mes vêtements en pile sur la commode, mes calepins crayons et ordinateur sur la table ronde de la cuisinette, et mes livres sur la table de chevet. Je me rends à la salle de bain où je dépose ma trousse de toilette. Je n’y mets presque plus rien. Si je me rappelle mes premiers voyages dans la vingtaine, j’y collectionnais les accessoires. Entre autres, cette affreuse machine épilatoire électrique, qui avait failli mettre le feu à mon appartement parisien, à cause de son adaptateur déficient. Je pense que c’est un des moments qui m’ont poussée à arrêter l’épilation. S’il en va de ma sécurité, je préfère mes poils. J’y traînais aussi mon maquillage, un parfum, des bijoux, choses que je ne porte presque plus aujourd’hui. J’ai tout de même apporté un mascara et un bâton de rouge à lèvres. Je sais que j’en aurai besoin pour me tracer un visage, pendant ces deux semaines à me mirer seule devant les glaces de la chambre et de la salle de bain. Je me regarde beaucoup pour faire passer le temps. J’ai développé ce réflexe depuis l’enfance, je ne sais pas si c’est un acte narcissique ou si c’est simplement une façon de me voir comme qui me voit, de me représenter mon image. Peut-être que c’est un réflexe animalier, comme une chatte qui ne comprend pas qu’elle est face à elle-même, se braque, croit peut-être se reconnaître puis se dédouble à nouveau. Dans mon appartement, à trois semaines de bateau, j’habite seule avec cette glace qui sert de porte à la douche. Alors parfois je suis avec une autre. Le confinement pandémique n’a pas beaucoup changé mon rapport à mon intimité. Je suis souvent seule. J’ai le loisir de l’éloignement quotidien.

 

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