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Note : Les femmes sont digérées par l’hôtel. Entrent, ressortent. Se libèrent de l’emmurement. Arrivent toutes par l’eau. On les met dans des bateaux et elles changent de place. Elles partent parce que leurs vies sont viciées, se reforment dans une communauté horizontale.

***

Je ne fais que penser à la cérémonie d’hier soir. Quand j’ai vu les femmes qui dansaient dans la forêt. Elles étaient prises de la même transe que moi. Nous étions des méduses. Molles et orgiaques. Je me rappelle mes chevilles qui ballotent ou flottent comme mille tentacules.

Je rêve que je fais de l’origami, mais de qualité supérieure. Je ne sais même pas faire une grue. Je plie tout, et plie plus petit et encore, et quand j’ouvre, ça a des formes d’hôtels. J’en plie plusieurs et je crée de nombreuses variations. J’entre alors dans ces édifices de papier et je fais des scènes. Je suis la fille en voyage qui entre dans un restaurant avec vue en traînant ma valise. Je m’assois à une table et un homme m’approche, je le connais en fait, c’est pour un rendez-vous. Je suis attendue quelque part, mais j’ai le temps de le suivre. Il me demande si je veux aller à sa chambre, j’hésite et dis que oui. On monte par l’escalier. Tous les murs sont blancs avec de grandes fenêtres. Dans sa chambre, nous prenons le thé. L’univers change et ressemble ensuite à la salle de bain de la chambre 44 au moment où la dalle se creuse.

 

fig. 8 — La salle de bain

 

J’entre dans le mur à la recherche de l’aile E, et retrouve l’escalier sablier. Je monte et arrive à l’étage des chambres. La E-1026 est débarrée et j’ouvre sur cette pièce qui ressemble à une tourelle. Le plancher y est rond, le toit en cône. Une fenêtre ancienne fait face à la forêt. Il y a un fuseau au milieu de la pièce. Je tombe dans un autre accordéon de papier, cette fois, le plancher est fragile et je le déchire en tombant dans les ruines. J’aperçois une femme qui souffre, les jambes ouvertes, je me rapproche et reconnais Madame Dou qui accouche. Je me réveille en sursaut. J’ai cru voir cette chose velue qui lui sortait d’entre les cuisses.

J’avais déjà imaginé ce monstre en rêve à l’arrivée, quand j’étais enfermée dans la 44 pendant les deux semaines de confinement. Et le voilà qui naît de la chair de Madame Dou. Je vis une de mes premières transes prolongées. Avant, ça ne m’était arrivé que deux ou trois fois peut-être, des fois notoires, dont celle que j’avais passée allongée sur le sol à m’imaginer un plafond en eau. Je garde encore un souvenir assez traumatisant de l’événement, parce que des personnes invitées au party m’avaient dessiné sur tout le corps à mon retour d’entre les limbes. Je n’ai aucun souvenir de ça. On m’avait écrit sur le ventre et les cuisses. Je ne sais pas pourquoi je parle de ça. C’est étrange. Tout est flou. La peur de l’endroit du sommeil m’a toujours habitée, je l’ai dit. Tamisha a dormi au dortoir quelques soirs cette semaine, je crois que c’est une bonne chose. C’est elle qui a préféré. Et je me rends compte que retrouver ma solitude me ramène dans le courant de l’écriture et ça me fait du bien. Il me faut ça. C’est le moment du désir et du doute.

Je regarde le dernier dessin que j’ai fait et je le comprends d’un coup. Toutes ces formes prennent des allures de tunnels.

 

fig. 13 — Map souterraine

 

Explorer les tunnels de l’hôtel avec la Québécoise

Note : Les femmes sont digérées par l’hôtel. Entrent, ressortent. Se libèrent de l’emmurement. Arrivent toutes par l’eau. On les met dans des bateaux et elles changent de place. Elles partent parce que leurs vies sont viciées, se reforment dans une communauté horizontale.

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Je ne fais que penser à la cérémonie d’hier soir. Quand j’ai vu les femmes qui dansaient dans la forêt. Elles étaient prises de la même transe que moi. Nous étions des méduses. Molles et orgiaques. Je me rappelle mes chevilles qui ballotent ou flottent comme mille tentacules.

Je rêve que je fais de l’origami, mais de qualité supérieure. Je ne sais même pas faire une grue. Je plie tout, et plie plus petit et encore, et quand j’ouvre, ça a des formes d’hôtels. J’en plie plusieurs et je crée de nombreuses variations. J’entre alors dans ces édifices de papier et je fais des scènes. Je suis la fille en voyage qui entre dans un restaurant avec vue en traînant ma valise. Je m’assois à une table et un homme m’approche, je le connais en fait, c’est pour un rendez-vous. Je suis attendue quelque part, mais j’ai le temps de le suivre. Il me demande si je veux aller à sa chambre, j’hésite et dis que oui. On monte par l’escalier. Tous les murs sont blancs avec de grandes fenêtres. Dans sa chambre, nous prenons le thé. L’univers change et ressemble ensuite à la salle de bain de la chambre 44 au moment où la dalle se creuse.

 

fig. 8 — La salle de bain

 

J’entre dans le mur à la recherche de l’aile E, et retrouve l’escalier sablier. Je monte et arrive à l’étage des chambres. La E-1026 est débarrée et j’ouvre sur cette pièce qui ressemble à une tourelle. Le plancher y est rond, le toit en cône. Une fenêtre ancienne fait face à la forêt. Il y a un fuseau au milieu de la pièce. Je tombe dans un autre accordéon de papier, cette fois, le plancher est fragile et je le déchire en tombant dans les ruines. J’aperçois une femme qui souffre, les jambes ouvertes, je me rapproche et reconnais Madame Dou qui accouche. Je me réveille en sursaut. J’ai cru voir cette chose velue qui lui sortait d’entre les cuisses.

J’avais déjà imaginé ce monstre en rêve à l’arrivée, quand j’étais enfermée dans la 44 pendant les deux semaines de confinement. Et le voilà qui naît de la chair de Madame Dou. Je vis une de mes premières transes prolongées. Avant, ça ne m’était arrivé que deux ou trois fois peut-être, des fois notoires, dont celle que j’avais passée allongée sur le sol à m’imaginer un plafond en eau. Je garde encore un souvenir assez traumatisant de l’événement, parce que des personnes invitées au party m’avaient dessiné sur tout le corps à mon retour d’entre les limbes. Je n’ai aucun souvenir de ça. On m’avait écrit sur le ventre et les cuisses. Je ne sais pas pourquoi je parle de ça. C’est étrange. Tout est flou. La peur de l’endroit du sommeil m’a toujours habitée, je l’ai dit. Tamisha a dormi au dortoir quelques soirs cette semaine, je crois que c’est une bonne chose. C’est elle qui a préféré. Et je me rends compte que retrouver ma solitude me ramène dans le courant de l’écriture et ça me fait du bien. Il me faut ça. C’est le moment du désir et du doute.

Je regarde le dernier dessin que j’ai fait et je le comprends d’un coup. Toutes ces formes prennent des allures de tunnels.

 

fig. 13 — Map souterraine

 

Explorer les tunnels de l’hôtel avec la Québécoise