Aurélie William Levaux
2021C020
Il ne s’était pas arrêté de pleuvoir. Eric caressait les cheveux de Martine. Tu vois que nous faisons encore l’amour, il avait affirmé non sans une certaine fierté. Tu vois que la passion n’a pas disparu, essaie de réaliser ce qui fonctionne entre nous, ma chérie, Eric avait murmuré. Martine lui avait jeté un tendre regard de ses grands yeux bleus. Elle qui était si orgueilleuse et pouvait se montrer si glaciale semblait s’être enfin adoucie. Comprends qu’avec tes questionnements, tes désirs impérieux et tes caprices, tu nous mets la pression, tu coinces notre relation et tu ne laisses pas les choses se faire naturellement, Eric avait continué plus fermement. Tu dois respecter le rythme de l’autre et te satisfaire de ce qu’il t’offre et te détendre, il l’avait sermonnée doucement. Oui, mais mon rythme à moi, qui le respecte ? avait demandé Martine, se crispant à nouveau. J’ai toujours la sensation d’être moralisée, de devoir étouffer mes émotions et de dépendre de ton bon vouloir, s’était-elle plainte. Eric avait poussé un long soupir las. Cette femme était un vrai boulet. Je ne suis pas un jouet, je ne suis pas un gigolo, Martine, je suis ton mari et avant ça un être humain, l’avait-il reprise. Martine lui avait tourné le dos et s’était mise à bouder. Soudain, ils avaient entendu des cris provenant de l’extérieur. Eric s’était précipité à la fenêtre. Purée, Martine, la rivière est en train de déborder, il avait hurlé.
***
En sortant de l’hôtel en courant pour comprendre ce qui se tramait dehors, Eric, vêtu d’un slip rouge, avait croisé Marc resté dans la 303 pour regarder le match de foot France-Italie. Eric et Marc, rejoints par le type au moignon, nu et transpirant, observaient le spectacle de la rivière déchaînée sortant de son lit et inondant maintenant le petit chemin devant « Le petit nid très au bord de l’Amblève », montant à une vitesse inimaginable en gros bouillons de merde noirs et marrons. Il faut absolument sauver les bagnoles, avait réagi Marc, pointant du doigt sa BM sur laquelle il avait fraîchement posé l’autocollant « Fuck you Greta ». Je ne suis pas motorisé, mais je vous accompagne, avait crié aigu le type au moignon, complètement paniqué parce qu’il ne savait pas nager. La mienne est garée plus haut dans le village, je viens avec vous, avait lancé Eric par-dessus le son du torrent furieux.
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En moins de deux minutes, l’eau avait déjà monté de vingt centimètres, sans plus aucun frein, sautant toutes les barrières, puissante, libérée et rageuse, elle commençait dangereusement à envahir le rez-de-chaussée de l’hôtel, embarquant tous les meubles dans ses flots boueux. Le garçon au teint mat et à l’élégance d’un oiseau rare que Martine avait contemplé dans l’ascenseur quelques heures auparavant avait déboulé, pelle, seau et raclette à la main. Je dois absolument aider ma grand-mère qui est coincée chez elle plus loin dans la vallée, pouvez-vous m’emmener avec vous ? il avait hurlé, essoufflé, les yeux sortant de leurs orbites. Le temps était compté, la tension palpable. Bientôt, l’eau atteindrait jusqu’à plusieurs mètres de hauteur. Les quatre hommes étaient entrés avec empressement dans la BM de Marc. Tandis qu’ils remontaient péniblement le courant sur le chemin devenu aussi rivière que la rivière, on pouvait voir, de la fenêtre de la chambre 212, Martine, livide, défaite, les regardant s’éloigner, les yeux remplis de larmes, laissant de longues traces de mascara sur ses joues. Si je survis, je me ferai vacciner, avait-elle gémi.
Choisir une fin pleine d’espoir
Choisir une fin pleine de désespoir