Scène romantique éclairée par les gyrophares
Delphine de Stoutz
2020A024
La femme et l’homme sont allongés sur les transats au bord de la piscine. Les étoiles qui éclairaient le jardin sont à présent balayées par la lumière bleutée des gyrophares des voitures de police arrivées en renfort suite au corps retrouvé dans la chambre 44. Dans l’histoire dont cette action est tirée, une dizaine de personnes suivent la scène depuis le bar à cocktail. Pour un souci d’intensité dramatique seuls la femme et l’homme y sont ici figurés. L’homme fume un joint.
L’HOMME — Tu en veux ?
LA FEMME — Non, je ne fume pas.
L’HOMME — Une demoiselle bien sage… Les gyrophares qui tapent sur les étoiles, ça déchire.
LA FEMME — Qu’est-ce qui va se passer ?
L’HOMME — Les flics vont prendre nos noms et nous interroger. Personne n’aura rien vu. Tout au long de la nuit des rumeurs prendront forme. Demain, des certitudes. Ou peut-être rien.
LA FEMME — Et pour lui ?
L’HOMME — Qui ?
LA FEMME — Le corps.
L’HOMME — Tu viens d’arriver, c’est ça ?
LA FEMME — Oui.
L’HOMME — L’hôtel, c’est un courant d’air. Rien ne s’accroche bien longtemps. À part l’enseigne au-dessus du porche. Le corps est déjà dans l’ambulance, les draps sont dans la laverie. La femme de ménage est à quatre pattes et frotte la moquette pour enlever les taches. Demain la chambre sera occupée par un couple d’Allemands. Tu es dans quelle chambre ?
LA FEMME — C’est vrai que c’est beau.
L’HOMME — Quoi ?
LA FEMME — Les gyrophares qui tapent sur les étoiles.
L’HOMME — Tu n’as pas de chambre, c’est ça ?
LA FEMME — Je suis déjà allée dans la 32.
L’HOMME — Celle envahie de plantes vertes. J’y ai séjourné avec mes parents. Je suis pratiquement né ici. J’imagine que ça fait de moi un courant d’air. Tu restes combien de temps ?
LA FEMME — Sur ce transat ?
L’HOMME — Non, à l’hôtel.
LA FEMME — Avec toi, toute la vie.
L’HOMME — Alors on se reverra.