Author: Delphine de Stoutz
sur les pavés d’un trottoir,
sur la banquette d’une station de métro,
dans la poche de salopette de ma soeur,
sur le rebord du lavabo des toilettes d’un aéroport,
sous mon lit, enfoncé dans la noirceur,
au fond du sac en plastique qu’une main négligente vient de jeter à la poubelle,
Adieu !
Je t’en foutrais moi, des femmes suspendues… Madame Kora ! Veuillez descendre s’il-vous-plaît ! On n’est pas assuré contre les chutes de mygales !
Monsieur Henri, mort empoisonné, pas très sweet, Amanite —
un comble pour un mycologue ! Certains pensent qu’il s’est suicidé.
Au menu, il n’y aura plus de champignons.
Et le patio au chêne remarquable qui porte son nom —
erreur mortifère ou acte héroïque.
Dans un coin, attablée seule au fond de la salle, la psy de l’hôtel a l’air bien fatiguée. Devant elle, posée sur la table, sa pancarte : « Je suis la cellule psychologique » et à côté, une bouteille de Bourbon pas très bon marché qu’elle descend consciencieusement en éternuant. Elle n’a pas de verre.
J’ouvre les yeux, mes paupières s’épaississent.
Je réalise : ça ne peut pas être fini.
La mort, la seule fin possible…
J’erre dans ce corps de femme,
Mes seins tombent, je les rattrape.
Pour un soir, changer de perspective,
Tenter dans ce hall hanté « le tout pour le tout ».
Le temps d’une soirée.
Dans la tête de Magda défilent les images de leur enfance à Porthof, la grande maison acquise par leurs arrières grands-parents dans les plaines du sud de Posen, les mémorables parties de chasse dans les bois alentour, les réunions de famille avec toutes les générations Wolfsmann, la fête des vendanges à la fin de l’été. Quelque chose dans ce bel établissement aux portes de Vérone lui rappelle ce passé.
Mon histoire commence d’ailleurs à Marseille sur la plage des Catalans, la plus proche du Vieux Port, vous connaissez ? On peut l’atteindre sans problème à pied ou en prenant le bus 83 toujours surchargé. Ce jour-là, un jour comme tous les autres, bien trop chaud pour un automne, la plage était bondée.
Hier soir, je suis rentrée de chez mon amie Maude à pied.
C’était une belle soirée.
Près de Hasenheide, j’ai failli marcher sur un corsage.
Elle me raconte le gouffre,
celui qu‘elle aurait aimé creuser
dans des textes audios laissés ici et là
au travers du chantier de l’hôtel
là où les textes se fondent
se reprennent
se logent.
Je veux lui montrer que si Adila se lance, tu peux plus l’arrêter ! Je vais toujours au bout des choses, quitte à finir sur les genoux. L’important, c’est de jamais abandonner. Sinon, pour sûr, je me ferai piétiner.
Il y a le sourire gras, le sourire souillé, le sourire précieux, le sourire poli. Mais le plus compliqué à réaliser, c’est le sourire instantané, celui qui sort d’un coup des tripes.
Les Lina ont la trentaine et sont mères de deux à trois enfants, bonne situation financière avec des conjoints qui travaillent beaucoup. Frustrées, mais toujours propres, elles ont arrêté de sourire il y a longtemps.
J’ouvre ma valise, et oui, j’ai toujours une perceuse sur moi. Je ne compte plus le nombre de trous faits dans des murs pour observer les voisins dans ce qu’ils ont de plus intime. Ce n’est pas du vice. Enfin, je suppose...
Je ne m’en fous pas de vos tristesses, de vos peurs, de vos manques, de vos bonheurs. Je dirais même… qu’ils m’attirent. Je ne suis simplement pas concernée, ni de près ni de loin.
Il est temps de partir. Je ne suis même pas fichu d’en faire un portrait-robot. Je n’ai pas retrouvé le rocher derrière lequel elle, suspendue, regardait l’Océan. Si ça se trouve, c’était une butte.
La psy n’est pas là, suspicion de covid. Le rendez-vous n’a pas été annulé. J’entre dans la chambre 1012. Contre les murs de la pièce, une planche clouée fait le tour. Sur une étiquette en papier, Eliane Chanton a écrit de sa main : « Patient de la chambre 708 ». Le reste ne m’intéresse pas, c’est là que je vais.
On a trouvé une poupée vaudou dans le placard de la 708. Si c’est vous, je vous poursuivrai pour magie noire. C’est dans le règlement, à l’article 11 : « La magie noire est interdite dans l’enceinte de l’hôtel. » On a une psy à demeure. Vous devriez consulter.
À marcher près d’Irène comme ça, j’imagine l’impensée, une vie à deux. Seul, je n’existe pour personne. Elle ne m’attire en aucun cas. Mes sens pensent à Tati Nana, mais celle que je cherche, c’est encore et toujours elle, la femme suspendue…
Le haut de son corps,
Depuis ses reins jusqu’au-dessus de son crâne
Dépasse de la butte, un tas de sable,
Je ne sais pas ce que c’est.
Elle me dit
Nous semblons faire la manche.
Je lui suggère
Nous taquinons l’inédit.
A peine allongée dans le lit les mots m'assaillent...
C’est ça “être une tombe”, c’est s’enterrer à l'intérieur de soi, se claquemurer, perdre les mots, la syntaxe et l’articulation. N’être plus qu’en dedans.
Ma chambre brillait de propreté, comme si elle avait voulu me faire disparaître. Chaque chambre a une odeur, des traces de vie sur le rebord du lavabo. Je me vois m’estomper à nouveau pour me rétablir encore dans la crasse de mon être, en laissant des poils et des cheveux sur le carrelage ou dans les draps, peu importe, là où il y a de la vie, il y a de la saleté.
Irène devant la porte de l’hôtel en train de fumer toute la matinée, ça fait négligé. Elle tourne en rond en traînant des pieds, ça fait des cercles sur le gravier.
Tous les jours je vais aux champignons, par tous les temps! Je sais y faire,
j'ai appris à les repérer. C'est qu'il faut s'y connaître! Sans me vanter j'ai un
bon flair, je les repère même sans regarder.
C’est avec le sentiment du devoir et par solidarité avec ses proches que nous tenons à contribuer à la recherche de la femme suspendue. Au-delà de cet acte de pure générosité, la direction de votre hôtel tient à exprimer sa solidarité avec toutes les femmes errantes et qui se sont, à un moment ou à un autre, égarées dans leur vie. On a beau être une entreprise lucrative, cela ne nous empêche pas d’avoir un cœur.
Le carrelage vert de sable aux grains doux râpe la forme de mes pieds, sculpte un à un chacun de mes orteils. Je pourrais marcher sur la lande comme ça pour une éternité… Mais déjà l’eau de la douche se fracasse violemment sur ma peau et je rougeoie sous le ciel, des éclairs du sol au plafond, orage d’été, impossible à régler, la température de l’eau est glacée.
elle n’en est pas à sa première crise de paranoïa de la journée
L’écran de son portable indique trente messages envoyés
quatorze tentatives d’appel
et un appel reçu
Les gens sont là,
Ils pourraient y être pour toujours
Et puis d’un coup, ils n’y sont plus.
Un jour ou le lendemain,
Ils disparaissent.
C’est révoltant.
Je marche beaucoup mieux avec mes sandales de guerrière.
Je mettrai des chaussettes pour l’hiver,
Un peu comme si j’étais allemand.
Je devrais peut-être pousser jusqu’à l’Océan ?
Mais ce matin, c’est pour moi un peu trop grand.
Comme elle fatigue Irène,
Ça la réveille la nuit,
Elle ne sort plus avec les copines
Ni même avec Jean-Louis.
LE PLAFONNIER EST CASSÉ
IL N’Y A PAS DE TÉLÉPHONE
UN POSTER DE L’OCÉAN ABIMÉ, PAS ACCROCHÉ
POSÉ NÉGLIGEMMENT À MÊME LE SOL,
LE MÉNAGE N’A PAS ÉTÉ FAIT
IL Y A UNE VILAINE TACHE SUR LA MOQUETTE
UN COFFRE FERMÉ À CLEF,
MAIS PAS DE CLEF
Plus tu descends, plus t’assures; donc quand tu commences en haut, t’es rien, t’es juste une raclure.
Berlin s’apaise avec ce tapis soudain, épais. Il n’y a plus de bruit, du moins je ne l’entends pas. Je suis juste là, incapable de bouger, plantée au milieu de la rue, hagarde. J’essaie de retenir ce rêve de la nuit, de retenir son visage. Maintenir le sentiment vaporeux de l’amour.
Du point de vue anté-post-hypermoderne, il y a dans toutes les familles, une tante qui a raté sa vie. Aujourd’hui encore, ça peut arriver, question de destin individuel.
Je ne dis pas que je laisse indifférent non, je ne dirais pas ça, mais j’ai l’âme ridée par plus de cent millions d’années d’une quête désespérée.
Il y a peut-être un distributeur de boissons avec des sucreries dedans. Un jour, dans un distributeur comme ça, j’ai vu une pomme.
Quartier colline surplombant la ville,
Quartier vallonné avec ses terrasses bondées.
Je marche seul et c’est vain.
Plus tard dans la nuit, à quatre heures trente du matin j’aurai vraiment faim, de ces faims qui vous trouent le ventre, pas juste l’estomac, de celles qui remontent par l’œsophage pour finir par vous grignoter le cerveau, de ces faims qui peuvent rendre fou.
Like A Rolling Stone: Un reportage suivant la Chanteuse du Bar en route vers le concert de Bob Dylan, lors de son passage à Berlin. Une profonde connection intellectuelle lie ces deux stars de génie.
Pas étonnant que Karl soit si dur avec toi, il n’en peut plus de vivre avec une vieille femelle béluga.
Elle s’était demandé si l’hôtel avait un escalier en colimaçon…
Et si c’était pour cela que les maux pouvaient trébucher, se vautrer
Rideau du soir qui s’affaisse brutalement sur la fenêtre de mon arrivée – point de départ.
Je voudrais vider mon sac, me mettre en quête, m’installer, sortir, trouver des indices, interroger, rencontrer, manger, boire, me doucher, baiser ?
La chambre sent le rance, mais elle a une grande fenêtre.
La poussière n’a pas été faite depuis un moment, même moi je le vois.
Il y a une vilaine tache sur la moquette, juste là, au pied du lit.
Ça y est, je suis installé dans la chambre 708.
Ça n’a pas été une mince affaire.
Je suis venu dans cet hôtel pour cette chambre-là.
Je ne suis pas venu que pour ça.
Je suis nouvelle dans cet hôtel. J’ai passé mon entretien hier, derrière mon écran. Je m’étais mise dans la chambre des enfants parce que le salon était trop en bazar ; je pouvais même pas refermer le clic-clac où je dors, tellement y avait d’habits dessus qui attendaient d’être pliés.
La Chanteuse du Bar célèbre son épisode ultime, accompagnée par un air bien connu de Cyndi Lauper et, en visioconférence, par un choeur de résidentes de l'Hôtel des Autrices.
Die Chanteuse du Bar zelebriert ihr großes Finale mit der wohl bekanntesten Hymne von Cyndi Lauper, begleitet von einem einem Videokonferenz-Chor der Bewohnerinnen des Hôtel des Autrices.
(FR) Maintenant que j’ai pris perpette dans ce jardin d’Eden, j’aimerais bien voir les gyrophares et entendre le son des sirènes. Ça casserait la routine de ce fichu bonheur de brochure.
(DE) Weil ich aber jetzt lebenslänglich in diesem Garten Eden einsitze, würde ich gerne die Scheinwerfer sehen und das Heulen der Sirenen hören. Das würde die Routine in dieser verdammten Katalogidylle durcheinanderbringen.
Quitte à tomber éternellement, autant s’en arranger, tirer le meilleur de la situation. Mais non, je continue à tomber ventre vers le sol invisible, les membres portés par la résistance de l’air à la gravité. C’est désagréable, je ne peux pas dire autrement.
La cuisine. Endroit curieux pour écrire. Le café décore le coin d’une feuille. Il est entré en guerre avec le gras. Gras du beurre. Beurre à lèvre. Lèvre pincée. Pincée de sel. Tout ramène à la cuisine.
Le chef cuisinier furieux sort des cuisines. La clope au bec, observe les étoiles du ciel. Elles brillent encore plus ce soir. Plus nombreuses, plus lumineuses, mais surtout très crâneuses.
manteaux longs et foulards virevoltants
gants de cuir et lunettes fumées
visages qui se dorent au soleil
Guidée par Once in a Lifetime des Talking Heads, la Chanteuse du Bar de l'Hôtel des Autrices se transforme en télévangéliste convulsive pour explorer les grandes questions existentielles de la crise de la quarantaine.
Geleitet durch den Talking Heads Song Once in a Lifetime transformiert sich die Chanteuse du Bar in eine krampfende Fernsehpredigerin und erforscht die existenziellen Fragen der Midlife-Crisis – und ja – es gibt Wasser am Grund des Ozeans.
(FR) Je me rêvais tortue, faisant exploser en mille morceaux mon antique carapace.
(DE) Ich träumte, Schildkröte zu sein und ließ meinen altehrwürdigen Panzer in tausend kleine Teile zerspringen. Knochen, Knorpel und Schildplatte verteilten sich im ganzen Schwimmbad.
L’isolement, je connais. Combien de fois ais-je été enfermée dans l’obscurité des chiottes à attendre que la tension redescende en pleurant en silence.
(FR) On roule jusqu’au bord de ma psyché. Les lumières de la ville se brisent soudainement contre l’orée invisible. Jour. Nuit.
(DE) Wir fahren bis an die Grenze meines Seelenlebens. Die Lichter der Stadt brechen sich plötzlich an dem unsichtbaren Rand. Tag. Nacht.
Bon Jovi, Princesse Diana et Donald Duck se croisent dans un bar: Si ça vous rappelle le début d'une blague de seins douteuse, c'est parce que la Chanteuse du Bar de l'Hôtel des Autrices réfléchit sérieusement à son avenir musical.
Bon Jovi, Princess Diana und Donald Duck treffen sich in einer Bar: Wenn uns das an den Anfang eines schlüpfrigen Witzes denken lässt, liegt das daran, dass die Chanteuse du Bar ernsthaft über ihre musikalische Zukunft nachdenkt.
Vendredi, jour parfait pour tomber en amour. La Chanteuse du Bar de l'Hôtel des Autrices nous révèle les meilleurs et les pires conseils de séduction, s'inspirant de The Cure et d'une recherche en profondeur sur les techniques de drague à la française.
Freitag, der perfekte Tag um sich zu verlieben. Die Chanteuse du Bar verrät die besten und schlechtesten Verführungstipps, inspiriert von The Cure und einer profunden Recherche französischer Flirttechniken.
Inspirée par les Rita Mitsouko et par son passé de karatéka dadaïste, notre Chanteuse du Bar de l'Hôtel des Autrices se transforme dans cet épisode en coach de vie un peu psychotique.
Inspiriert von den Rita Mitsouko und ihrer eigenen Vergangenheit als dadaistische Karateka verwandelt sich unsere Chanteuse du Bar in dieser Episode in einen etwas psychotischen Lebenscoach.
"Ça pas l'air d'une chanteuse, on peut pas y croire...": une scène de film qui pourrait peut-être s'appliquer à notre Chanteuse du Bar, mais définitivement pas à Marjo.
"Sie sieht nicht aus wie eine Sängerin, absolut unglaubwürdig...": vielleicht trifft dieses Film-Zitat ja auf unsere Chanteuse du Bar zu, auf Marjo aber ganz sicher nicht.
Sortez vos briquets, c'est l'heure de danser dans le noir.
Holt eure Feuerzeuge raus! Es ist Zeit, im Dunkeln zu tanzen.
Grâce à la Bad Girl M.I.A., la Chanteuse du Bar de l'Hôtel des Autrices plonge cette fois dans un puits d'anecdotes liées à l'une des grandes devises du rock'n'roll: live fast, die young.
Gemeinsam mit dem Bad Girl M.I.A. stürzt sich die Chanteuse du Bar diesmal in einem Pool von Anekdoten, die mit einem der großen Werte des Rock'n'Roll verbunden sind: leb schnell, stirb jung.
La nuit appartient aux Lovers: ça, la Chanteuse du Bar l'a appris grâce à Patti Smith, et c'est pourquoi elle lui rend dans cet épisode tout plein d'amour en retour.
Die Nacht gehört den Liebenden: Diese Lektion verdankt die Chanteuse du Bar Patti Smith, und deshalb schickt sie ihr in dieser Episode ganz viel Liebe zurück.
À la demande générale, la Chanteuse du Bar explique dans cet épisode pourquoi Hotel California des Eagles ne fait pas partie de son répertoire.
In dieser Folge erklärt die Chanteuse du Bar warum das Lied Hotel California von den Eagles nicht in ihrem Repertoire ist.
Tu obtiens cette sorte de pièce de monnaie que tu peux utiliser pour déverrouiller certaines zones où il y a plus de textes à lire.
C’est un peu comme dans un jeu vidéo…
Hélène brûle de passer la frontière et aller voir de l’autre côté. Elle imagine une danse avec ces deux êtres qu’elle connaît à peine.
(FR) Et pourtant, toi aussi, je t’ai aimé. N’est-ce pas toi qui m’as appris à faire du vélo à deux roues sur le chemin pierreux qui descend vers le lac ?
(DE) Dabei habe ich auch dich geliebt. Warst nicht du es, der mir das Fahrradfahren beibrachte auf dem steinigen Weg, der zum See hinunter führt?
Brume sur champ de ruines
à mes pieds, la rosée
baignée des premiers rayons du soleil.
À quoi elle tenait cette femme-là, pour être si bien suspendue que ça ? À quoi elle tenait, je ne sais pas.
(FR) Je suis arrivée par l’océan Nord après environ trois semaines de navigation. Le bateau nous a laissées, elle et moi, sur un radeau au large d’une grande croûte de glace.
(DE) Nach rund drei Wochen auf dem Nördlichen Ozean kam ich an mein Ziel. Das Boot setzte uns, sie und mich, auf einem Floß vor einer dicken Eisschicht ab.
La nuit est mauve et je ne dors pas, j’ai oublié la douceur.
Chambre sur rue… Je n’en voulais pas.
Mon chemin se poursuit. Ma valise est ma seule bouée de sauvetage
(FR) Je suis arrivée par l’océan Nord après environ trois semaines de navigation. Keno, une Inuite, nous attendait sur le désert blanc.
(DE) Nach rund drei Wochen auf dem Nördlichen Ozean kam ich an mein Ziel. Das Boot setzte uns, sie und mich, auf einem Floß vor einer dicken Eisschicht ab.
(FR) Il y a un sentiment étonnant de se retrouver dans une chambre qui ne bouge plus.
(DE) Es fühlt sich seltsam an, in einem Zimmer zu stehen, das sich nicht mehr bewegt.
(FR) Je trouve déjà pénible de retourner dans ma cellule. Mais je comprends qu’il faut que je me confine.
(DE) Ich habe schon jetzt keine Lust mehr, in meine Zelle zurückzugehen.Gleichzeitig ist mir klar, dass ich mich isolieren muss.
Alors, oui, l’hôtel est excentré, elle devra prendre le bus pour y aller, mais elle y sera à l’abri. Et puis de ce qu’elle a compris, il n’y a presque que des femmes qui y travaillent. « L’Hôtel des Autrices », ça peut pas venir d’un mec un nom pareil, si ?
(FR) J’écris étendue sur mon lit même si la table ronde possède trois chaises. Je me regarde noircir les pages dans la grande glace.
(DE) Ich schreibe im Bett, obwohl drei Stühle um den Rundtisch stehen.
Je sors de mon champ de bienveillance-résilience, bah oui. Y a pas mort d’homme, hein ? (Alors que de femmes… mais bon, autre sujet, autre sujet !)
(FR) La salle de bain est coquette. J’admire les motifs des carreaux quand je suis aux toilettes. J’ai remarqué une tuile posée à l’envers.
(DE) Das Badezimmer ist hübsch anzusehen. Wenn ich auf dem Klo bin, bewundere ich die Fliesenmotive. Eine der Kacheln steht Kopf.
je te dirai des mots
des mots
j’ai oublié le nom du chanteur
(FR) Je me masturbe devant le miroir au-dessus des yeux de ma commode en regardant mes pauses.
(DE) Ich masturbiere vor dem großen Spiegel über der glotzäugigen Kommode und betrachte mich immer wieder darin.
La Chanteuse du Bar de l'Hôtel des Autrices vous présente son concept: au lieu chanter, elle vous livre ses monologues, vous révélant son répertoire de grand succès internationaux de chansons du genre "bar de motel".
Die Chanteuse du Bar des Hotel des Autrices präsentiert ihr Konzept: Sie singt nicht wirklich, stattdessen monologisiert sie über die Songs in ihrem Repertoire, die großen internationalen Erfolge des "Motel-Bar" Genres.
(FR) Assise sur la toilette, je fixe la tuile.
(DE) Ich pinkle ins Klo und starre auf die Kachel.
(FR) Je me sens aussi souvent craintive des nouveaux sommeils dans des endroits inconnus.
(DE) Auch den Schlaf fürchte ich an fremden Orten.
(FR) J’écris enfin sur la table, pour mieux observer le lit.
(DE) Inzwischen schreibe ich doch am Tisch, um das Bett besser im Blick zu haben
(FR) Je descends dans les entrailles de l’hôtel, retrouvant le sentiment du château.
(DE) Diesmal führen die Gänge abwärts und ich steige ins Eingeweide des Hotels hinab, das einer Burg ähnlich wirkt.
(FR) Je me demande comment vit la femme aux jolis yeux dans sa chambre jumelle. Écrit-elle elle aussi ? Est-ce qu’elle pense à moi ?
(DE) Ich frage mich, wie wohl die Frau mit den schönen Augen in ihrem Zimmer nebenan lebt. Schreibt sie auch? Denkt sie an mich?
(FR) J’attends que l’on vienne m’autoriser à sortir. Je passe la journée sur mon lit à paresser puis me déplace au balcon, la piscine est toujours vide.
(DE) Ich warte auf die Erlaubnis, mein Zimmer zu verlassen. Tagsüber faulenze ich im Bett, anschließend trete ich auf den Balkon. Der Pool ist wie verwaist.
(FR) Ce que tout ça peut être cryptique. J’ai besoin d’air. Je ne sais pas ce qui m’a fait concevoir ce passage en songes.
(DE) Alles ist so kryptisch. Ich muss hier raus. Ich weiß nicht, wie es möglich ist, dass ich im Schlaf diesen Gang ersonnen habe.
(FR) Le voyage à bord du navire ne m’a pas fait bien feeler. J’ai eu mal au cœur souvent même si j’avais traîné mes médicaments contre le mal de mer.
(DE) Vor der Küste wurden wir, sie und ich, auf einem Floß abgesetzt. Wir manövrierten uns durch das Schelf und erreichten eine feste Eisschicht, wo Keno, eine Ureinwohnerin, auf uns wartete.
(FR) Le voyage à bord du navire ne m’a pas fait bien feeler. J’ai eu mal au cœur souvent même si j’avais traîné mes médicaments contre le mal de mer.
(DE) Vor der Küste wurden wir, sie und ich, auf einem Floß abgesetzt. Wir manövrierten uns durch das Schelf und erreichten eine feste Eisschicht, wo Keno, eine Ureinwohnerin, auf uns wartete.
(FR) Il fait froid au Nord et chaud à l’Ouest. Manigances atmosphériques ou métaphysiques ?
(DE) Die Quebecerin führt oft laute Selbstgespräche, und die Wände sind schlecht schallisoliert. Entweder sie ist sehr ängstlich – oder sie erkundet das Zimmer mit ihren imaginären Freund*innen.
(FR) Aujourd’hui marque la fin de ma quarantaine, je ne sais pas si elles viendront cogner à ma porte pour m’inviter à sortir.
(DE) Es ist Mittag und niemand hat mich aus dem Zimmer geklopft. Also öffne ich die Tür und habe vor mir eine Wand,
(FR) Le moment de l’entrée en eau a été comme une deuxième naissance. C’est que je croyais sauter directement vers ma mort.
(DE) Ich muss die anderen warnen. Wozu die Wände hinter den Türen?
(FR) Je me promène dans la vieille serre vitrée. Je ne peux pas expliquer ma joie qui semble émaner de moi comme si j’étais une sainte.
(DE) Ich spaziere durch das alte Gewächshaus. Ich kann mir selbst nicht erklären, warum ich derart strahle vor Freude, als ob ich eine Heilige wäre.
J’ai flotté sur le dos en tenant un morceau de bois dans mes bras. Je ne sais pas combien de temps. Je pense que son calcul ne veut plus dire grand-chose.
J’ai flotté sur le dos en tenant un morceau de bois dans mes bras. Je ne sais pas combien de temps. Je pense que son calcul ne veut plus dire grand-chose.
La première nuit après l’accostage, j’étais dans cette tente. Séparée des autres par des paravents. Les infirmières nous ont examinées. J’ai bu et mangé, mais je n’avais pas d’appétit.
(FR) Son nom, elle me dit, est Madame Dou. Elle s’occupe de la serre depuis plusieurs années.
(DE) Sie sagt, ihr Name sei Madame Dou. Seit einigen Jahren schon kümmere sie sich um das Gewächshaus.
Je suis montée dans l’échelle pour voir si la fille de la 44 s’était éclaté la tête sur son mur, mais je ne l’ai trouvée nulle part. Elle s’est volatilisée.
L’infirmière est venue me chercher pour me faire déménager de la tente à l’hôtel. Elle m’a fait mettre un masque.
L’aile B se trouve aussi à l’étage, mais de l’autre côté de la cour intérieure. On y retrouve Kass avec Farah et Warsama, qui logent dans le même dortoir, avec Maria.
(FR) Silvia et Danaé m’ont montré l’espace de la bibliothèque en début de soirée. L’architecte et l’archéologue, avec l’autrice.
(DE) Am frühen Abend haben mir Silvia und Danaé den Bibliotheksbereich gezeigt. Die Architektin, die Archäologin und die Schriftstellerin.
Je n’ai pas été seule dans une pièce depuis environ trois années. Je me retrouve face à moi-même, juste avec ma mémoire.
(FR) Nous sortons dans la cour intérieure où nous nous asseyons parfois dans les estrades, pour regarder les spectacles.
(DE) Wir betreten das geräumige Zimmer, wo Silvia, Danaé und Kass Argo bereits auf uns warten. Wir gesellen uns zu ihnen, plumpsen in den Schaukelstuhl am Kaminfeuer.
(FR) Je me réveille dans la chambre 44, à l’exception près qu’elle a été virée à l’envers pendant mon sommeil. La fenêtre est rendue sur ma droite. J’ai la tête dans le cul.
(DE) Ich wache in Zimmer 44 auf – bloß muss es jemand umgedreht haben, während ich geschlafen habe. Das Fenster ist jetzt zu meiner Rechten. Ich habe einen Kater.
(FR) Je rejoins Felcie au labo du quatrième. Elle est assise devant son microscope avec les médecines Jane et Mei. Elles testent les nouveaux vaccins interceptés par Argo.
(DE) Ich bin im Hotel gelandet, weil ich Nicaragua damals verlassen musste, aber seit vierzig Jahren ist mein Zuhause hier, auf diesem Gelände mit seinen Gärten und seiner Frauen-Armee.
J’ai de la difficulté à dormir à cause des cauchemars. Dès que je m’endors, il semble y avoir un mécanisme psychique qui m’oppose au sommeil.
J’ai de la difficulté à dormir à cause des cauchemars. Dès que je m’endors, il semble y avoir un mécanisme psychique qui m’oppose au sommeil.
La jonction s’effrite et trace une ligne profonde entre les dalles. Je joue à détruire ce qui me contient. Ma peau.
(FR) Tamisha est aux petits soins avec moi, elle me fait des tisanes. J’ai essayé de manger, mais je suis encore malade si j’avale quoi que ce soit. Je reste couchée dans son lit.
(DE) Können Träume das Hotel beeinflussen? Im Keller des Hotel-Palimpsests liegen all die Tunnel verborgen; sie vernetzen die Räume und führen bis zur Ruine hinab.
(FR) Tamisha est aux petits soins avec moi, elle me fait des tisanes. J’ai essayé de manger, mais je suis encore malade si j’avale quoi que ce soit.
(DE) Tamisha sorgt für mich, sie macht mir Kräutertee. Ich habe versucht etwas zu essen, doch mir wird jedes Mal übel, sobald ich etwas zu mir nehme.
(FR) J’arrive enfin à me lever et je descends de l’étage pour aller dîner. Mais juste avant, je fais un détour vers la bibliothèque.
(DE) Ich kann endlich wieder aufstehen und gehe zum Mittagessen nach unten. Aber zuerst mache ich einen Umweg zur Bibliothek.
les baleines dansent au milieu de l’océan Est
font danser la mer qui fait de douces vagues
(FR) C’est les mains dans la terre que nous nous sentons le plus connectées à ce qui nous entoure. Nous le savions jadis et le savons encore, c’est auprès de la nature et des animaux que nous voulons vivre le plus.
(DE) Kass ist bereit, weitere Personen auf ihrem Boot aufzunehmen. Sie müsse die Frauen allerdings selbst auswählen, meint sie, also möchte sie uns treffen, um darüber zu verhandeln.
C’est les mains dans la terre que nous nous sentons le plus connectées à ce qui nous entoure. Nous le savions jadis et le savons encore, c’est auprès de la nature et des animaux que nous voulons vivre le plus.
(FR) Kass dit être prête à accueillir de nouvelles personnes sur son bateau. Mais qu’il faut qu’elle les choisisse elle-même, et alors, elle va venir nous voir pour en discuter.
(DE) Kass ist bereit, weitere Personen auf ihrem Boot aufzunehmen. Sie müsse die Frauen allerdings selbst auswählen, meint sie, also wolle sie uns treffen, um darüber zu verhandeln.
(FR) J’ai refait les plans de l’aile E pour la maquette. Je n’étais plus satisfaite de ce que je dessinais. J’essaie de travailler dessus tous les jours, dans la E-1011. Je me suis fait un bureau ici.
(DE) Ich betrete Madame Dous Zimmer, sie sitzt in einem Sessel. Ich nehme ihr gegenüber Platz. Sie serviert mir einen Heilkräutertee, der nach Wurzeln und einem Hauch von Minze riecht.
J’ai refait les plans de l’aile E pour la maquette. Je n’étais plus satisfaite de ce que je dessinais. J’essaie de travailler dessus tous les jours, dans la E-1011.
(FR) Je passe chez Madame Dou ce matin, salue Bao sur le divan devant les télés. Monte l’escalier et remarque que la porte de la première pièce est fermée. Quand j’arrive à sa chambre, je la trouve assise dans son fauteuil.
(DE) Ich nehme ihr gegenüber Platz. Sie serviert mir einen Heilkräutertee, der nach Wurzeln und einem Hauch von Minze riecht.
À l'époque, c'était encore plutôt rare d'avoir comme Capitaines, des personnes qui s'identifiaient autrement qu'au genre masculin.
Maman était sûre que j’étais morte. Je suis restée sur le bateau toute la nuit, je ne vais jamais retourner dans l’hôtel qui contient cet autre monstre.
(FR) J’écris dans la chambre 45 pendant que Tamisha est sur le bateau. C’est la deuxième journée de leur formation.
(DE) Solange Tamisha auf dem Boot ist, kann ich in Zimmer 45 schreiben.
(FR) J’écris dans la chambre 45 pendant que Tamisha est sur le bateau. C’est la deuxième journée de leur formation.
(DE) Solange Tamisha auf dem Boot ist, kann ich in Zimmer 45 schreiben. Es ist der zweite Tag ihrer Ausbildung.
(FR) À l’extérieur, je regarde les arbres et je les trouve beaux. Je vais en prendre un dans mes bras. Je le sens tandis que je frotte mon visage dans ses lichens. Puis j’entre dans la forêt.
(DE) Draußen sehe ich die Bäume und finde sie schön. Ich umarme einen Stamm. Reibe mein Gesicht in sein Flechtwerk und spüre ihn.
(FR) Je me réveille à l’aube sous les rires des femmes de l’équipe d’aquaforme. Elles sont debout dans le jardin et me regardent d’un air taquin.
(DE) Ich erwache am frühen Morgen vom Gelächter der Aquagym-Frauen.
Le jardin Nord-Ouest est subtilisé derrière la vieille enceinte de l’époque du château. On parle d’une muraille du douzième siècle.
Je retrouve Kenojuak sur le pont toutes les semaines pour la livraison du sirop qui me délivre du mal de mer. Je la fais rire quand je lui dis qu’elle est ma sauveuse, ma délivreuse, ma médecine personnelle. Cette mamie est un vrai trésor.
(FR) Je ne fais que penser à la cérémonie de l’autre soir. Quand j’ai vu les femmes qui dansaient dans la forêt. Elles étaient prises de la même transe que moi. Nous étions des méduses.
(DE) Die Frauen werden vom Hotel verdaut. Sie gehen hinein und kommen wieder heraus. Sie überstehen die Einmauerung.
(FR) Je ne fais que penser à la cérémonie de l’autre soir. Quand j’ai vu les femmes qui dansaient dans la forêt. Elles étaient prises de la même transe que moi. Nous étions des méduses.
(DE) Ständig muss ich an die Zeremonie von gestern Abend denken. Als die Frauen im Wald getanzt haben. Sie waren wie ich in Trance. Wir waren Quallen.
(FR) Je ne pense pas avoir rêvé ni halluciné. De toute façon ici, il n’y a aucune règle narrative. Dans l’étang aux carpes, ce matin, j’ai vu cette chose briller.
(DE) Ich glaube, dass ich weder geträumt noch halluziniert habe. Jedenfalls gibt es hier keine Erzählregeln. Heute Morgen habe ich im Karpfenteich dieses Funkeln gesehen.
(FR) Depuis que je suis arrivée ici, je me sens comme tiraillée entre deux mondes, deux chaises, deux chambres. Je ne sais plus comment penser mon corps ni mon affiliation.
(DE) Seit ich hier bin, befinde ich mich im Zwiespalt der Welten, der Empfindungen, der Zimmer. Ich weiß nicht mehr, wie ich meinen Körper finden soll, oder meine Aufnahme in die Gemeinschaft.
les panik du bateau
sont comme nos guerrières